Encore et toujours des cris. Pourquoi ces murs sont aussi fins ? Je prends même plus la peine d'écouter de quoi il s'agit puisque je le sais pertinemment. La raison de ses disputes incessantes sont à propos de mon petit frère Danny. Mes parents n'arrivent pas à se mettre d'accord sur l'éducation de leur fils surdoué et à les entendre c'est comme s'ils regrettaient sa naissance. Alors moi, j'ai pris l'habitude de m'enfermer dans la chambre dès que je sens une once d'énervement et me met de la musique pour rien entendre. Malgré mes efforts, j'entends toujours un peu, souvent des choses que je ne cautionne pas mais c'est comme ça, je n'ai pas mon mot à dire. Affalé sur mon lit, casque aux oreilles, prêt à fermer les yeux, je vois Skye au seuil de ma porte. Instinctivement, j'enlève mon casque à moitié et lui dit : « Plus tard s'il te plaît. » - « Non tout de suite. J'ai quelque chose à te dire. » Elle est aussi entêtée que moi, tellement que ça en devient effrayant. En tout cas, elle a l'air déterminée à me parler donc je ne cherche même pas à débattre sur ce coup là. Surtout que ça a l'air sérieux. Je retire tout et m'assied de sorte à l'avoir bien en face dans mon champ de vision. Je soupire et lui lance un regard l'air de dire que je suis tout ouïe. « Je t'écoute soeurette. Me dis pas que t'es enceinte... » - « Sérieusement Nono ? » Et au coup que je viens de recevoir à l'épaule, je comprends que ce n'est pas ça. Je sais qu'elle est pas ce genre de fille imprudente mais sait-on jamais. Je suis soulagé mais pas entièrement. Pas tant qu'elle ne m'explique qu'est-ce qui se passe. « Je sens ta réaction à des kilomètres mais reste calme tu veux ? J'ai décider de partir d'ici. J'ai besoin de changer d'air. Fairfax n'est plus pour moi et l'Europe me tente bien. On pourra toujours s'appeler, s'envoyer des messages et se faire des conversations vidéo, promis. » J'hallucine. Elle est pas réellement en train de m'annoncer son départ à l'autre bout du monde, si ? J'avoue que les mots me manquent. Je vois pas ce que je peux dire pour la dissuader de cette idée, ce serait égoïste de ma part. Même si je sais pas ce qui est le plus égoïste entre sa décision et mon désir qu'elle reste. J'essaie tout de même de garder mon sang froid mais ce n'est pas facile. « Alors tu nous abandonnes Danny et moi. Si c'est ce que tu veux vraiment, très bien, fais-le. » Je suis certain qu'elle est capable de détecter la déception dans ma voix. Après tout, c'est ma jumelle. Elle n'est pas revenue sur sa décision pour autant alors je lui ai fait bien comprendre que je lui en voulais. Je me débrouille pour prendre soin de Danny et si je n'ai pas déguerpi comme Skye alors que l'envie n'est pas ce qui manque, c'est simplement parce que je suis incapable de laisser mon petit frère tout seul avec ses deux idiots qui nous servent de parents.

Il était derrière les barreaux. Au moins pour 3 ans - s'il se comporte bien, en sortie conditionnel - et pour un délit qu'il n'avait pas commis. Il était accusé d'avoir percuter - et tuer - un inconnu sur la route. Sully avait juste préférer prendre la place de sa copine. Accepter la peine à sa place plutôt que de la laisser vivre l'enfer qu'est la prison. Sur le moment, à l'arrière de la voiture, je pensais pas qu'il irait jusqu'au bout de son idée et pourtant. Je le savais brave, mais pas autant. Maintenant qu'il était cloîtré, je n'avais qu'une seule chose à faire. Il m'avait fait promettre de protéger Odélia et je ne suis pas du genre à dire des paroles en l'air. « Je devrais être à sa place. J'aurais pas dû le laisser faire. » Elle faisait les cents pas dans ma chambre. La voir dans cet état me faisait quelque chose mais c'était chose faite. Il n'y a pas de retour en arrière. Il ne restait que nous. J'étais affecté aussi, pas autant qu'elle mais je l'étais. Je m'efforce juste de ne pas le montrer. J'avais bien du mal à la calmer mais j'y parviendrais par un moyen : mon humour à deux centimes. Elle a toujours dit qu'elle appréciait ce côté là de moi alors autant en faire bon usage, non ? « Je sais que tu t'en veux mais il l'a fait pour toi et arrête de tourner en rond tu me donnes la migraine. » Odélia m'esquisse un maigre sourire. J'ai pas eu le droit à celui avec toutes les dents mais c'est un début. Je me lève et me dirige vers mon comptoir pour servir deux verres de Whisky. « Prends ça, je pense que t'en as besoin. » Je bois la mienne cul sec et m'affale comme un tas sur mon lit. Elle me rejoint et se met à mes côtés, le regard bien insistant. J'aurais préféré qu'elle me tape ou n'importe quoi, parce que faut dire que c'est le genre de chose chez elle qui me perturbe assez alors que ça ne devrait pas. Je peux pas en pincer pour elle. Elle est la copine de mon meilleur ami, merde. « Merci et pas juste pour le verre. T'es là pour moi comme peu de personnes dans ma vie... » Je repose mon attention sur elle - puisque jusqu'à présent je fixais le mur - et soupire. « Et je le serais toujours. ». Et là c'est bizarre. Sans un mot de plus, on se regarde l'un et l'autre, et puis, je finis par coller mes lèvres contre les siennes. Je suis étonné qu'elle ne me repousse pas. Il a fallut une poignée de secondes pour que la culpabilité nous rattrape. J'avais trahi mon meilleur ami. Je me dégoûtais moi même d'avoir fait ça et il ne devait pas l'apprendre, ce rapprochement de ses derniers jours, cette relation, cette histoire qu'on appelle inachevée. Jamais.

« Qu'est-ce qu'il ne va pas ? » Je la connais par cœur à force. Je sais qu'elle me fait la gueule pour quelque chose mais elle s'est toujours pas décider à m'en parler alors je prends l'initiative de lui demander. Même si faut dire, j'ai une petite idée de la raison pour laquelle elle est bizarre depuis qu'on est rentrés de cette soirée entre amis. « Tu te fiches de moi Douglas ? » J'ai à peine le temps de répliquer quoi que ce soit que je reçois un coussin en pleine face. J'ai pas choisi la plus douce des petites amies, vraiment. Jules est tout sauf ces filles que l'on voit dans ses films à l'eau de rose. Elle a son propre caractère et autant dire qu'il en faut pour la supporter. Je ne suis pas moins chiant non plus, je dirais qu'on est au même niveau mais bon. Je suis encore surpris de moi-même d'avoir tenu aussi longtemps. Je suppose que l'amour nous fait faire des choses qu'on ne pensait pas en être capable. Je suis encore surpris de moi-même d'avoir tenu aussi longtemps. Je suppose que l'amour nous fait faire des choses qu'on ne pensait pas en être capable. Je sens l'énième dispute arrivé comme une maison. Seulement là, ça allait être différent. « J'y arrive plus. J'ai la sensation d'être étouffée et de ne pas vivre ma vie comme je l'entends. Toi et tes crises de jalousie, ton impulsivité, toi tout court. C'est un tout en fait. » J'ai pas besoin qu'elle en dise plus. Elle était à saturation et au bout de 1 an, je peux le comprendre, mais de là à nous séparer ? Je ne saute pas au plafond, forcément, mais peut être que c'est la meilleure chose à faire. Je vois pas l'intérêt de rester ensemble si je la rends malheureuse. Tout est clair, Jules n'est pas faite pour les relations de couple, bien trop indépendante. Et mon caractère n'aide en rien non plus. « Je suis désolé. Tu n'auras plus à me voir de toute façon puisque j'ai été prise comme présentatrice météo à DC Washington. » Je suis à la fois triste et énervé, c'est assez étrange mais c'est ça. Vu que je préfère pas m'attarder sur la séparation et donc risquer d'extérioriser mon ressenti, je lâche un soupire et lui dit : « Bon courage à DC alors. » Je prends mes affaires et lui tourne le dos. Faire comme si j'étais indifférent. L'ironie c'est que je la revois à Washington deux ans plus tard, fiancée. Elle qui est soit disant allergique aux engagements.