Le grand blond avait assisté à un concert rock la veille, puis il était allé dans divers bars et clubs durant toute la nuit. Il s’était transformé en un oiseau nocturne à la recherche de musique qui éveillerait son âme, et qui lui permettrait de se changer les idées. L’avantage de n’avoir personne qui vous attendait à la maison, c’était de pouvoir faire ce genre de folie. Il avait donc fait en tout deux bars et trois clubs branchés, ce qui n’était sacrément pas mal en une seule nuit. Pour l’occasion, il avait d’ailleurs retrouvé quelques potes, avec qui il avait passé un excellent moment. Mais la réalité finit par le rattraper au petit matin, où il tombait presque de fatigue à l’heure où beaucoup de monde se levait pour aller au travail. Décidant d’aller à son hôtel plutôt que de prendre le risque de s’endormir au volant de sa voiture, il était un peu moins de six heure du matin quand il franchit la porte de sa chambre. Harassé par sa journée de boulot et par cette nuit blanche, il ne prit même pas la peine de se déshabiller, et tomba littéralement sur son lit. Il eut juste le courage de ramper jusqu’à l’oreiller, et de passer la couverture sur lui. Et en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il s’était déjà endormi. Sombrant comme une masse dans un sommeil sans rêve. Aussi, quand un bruit strident se fit entendre de loin, il eut d’abord le réflexe de passer la couverture par-dessus sa tête pour ne plus être dérangé, puis se souvint que c’était peut-être important, qu’un employé avait un souci avec un client de l’hôtel. Il se tira alors difficilement du lit, et se passa les mains sur le visage dans l’espoir d’en faire partir la fatigue. Au moins, il était déjà habillé. Il sentait peut-être un peu l’alcool et le tabac, mais rien qui ne fasse fuir. Enfin, il l’espérait.

Ouvrant la porte, il tomba nez à nez avec Elena, une des rares personnes qu’il considérait parmi ses proches. « Salut. » fit-elle avec une petite voix. Il avait connu la jeune femme à l’époque où elle était cliente de son hôtel, et vu qu’ils avaient les mêmes passions et une histoire assez similaire, ils s’étaient de suite bien entendus. Faisant ensuite des festivals ensemble, assistant aux mêmes concerts et visitant les mêmes musées, ils étaient rapidement devenus amis et meilleurs amis. Aujourd’hui, elle était une des rares personnes à connaître la dualité de sa personnalité, et ils s’entendaient à merveille. C’est pour ça que, malgré la fatigue, il comprit de suite que quelque chose n’allait pas. Ce n’était pas tant l’heure qu’il était, mais surtout le timbre de sa voix et cette petite larme rapidement effacée qui l’alerta. « Oh toi, y a quelque chose qui va pas. » remarqua-t-il en se frottant les yeux. « Rentre vite et dis-moi tout. On va s'installer dans le salon. » Il se poussa pour la laisser entrer, et ferma la porte derrière elle. Il prit ensuite les devants en passant devant elle, et ils s’installèrent dans le divan en cuir blanc au milieu de la pièce. « Alors ma petite puce, qu’est-ce qui se passe ? » demanda-t-il avec douceur et inquiétude, une fois installé à côté d’elle, et près à la prendre dans ses bras si jamais elle craquait. Il ne connaissait pas encore la raison de sa tristesse, mais il espérait que ce ne soit pas trop grave. Et bien que ses paupières menacent de se fermer à tout instant, il se sentait près à agir si jamais quelqu’un lui avait fait du mal. Il y avait peu de personnes à qui il tenait dans ce monde, et il était d’un naturel très protecteur avec celles-ci.

Malgré la fatigue qui l’étreignait, Maxence était on ne peut plus aux aguets, inquiet pour sa meilleure amie. Il n’avait clairement pas l’habitude de la voir ainsi, et c’était même sûrement la première fois qu’il la voyait si mal. Sans forcément être quelqu’un qui croquait la vie à pleine dent, le grand blond n’était pas non plus le genre à se lamenter, et Elena lui ressemblait sur ce point-là. Aussi mesurait-il à quel point quelque chose de grave devait s’être passé, ou allait se produire. S’installant à ses côtés sur le canapé, il l’encouragea avec douceur à lui vider son cœur. « Tu sais, il y a quelques années, un peu plus de six ans plus précisément, je devais me marier avec Isaak mais le jour du mariage, il est parti sans donner d'explication, me laissant comme une conne avec tout les invités et ma tristesse... J'ai beaucoup souffert de cet événement. J’ai voyagé en Russie pour changer d'air. J’ai beaucoup grandi grâce à ça, je me suis construite, devenant de plus en plus forte. J'ai trouvé ma voie et j'ai appris à vivre sans lui... » Maxence hocha la tête. Il se souvenait de cet épisode dans la vie de la jolie blonde, puisqu’elle lui en avait déjà parlé, même sans rentrer dans les détails. Il n’avait pas su quoi penser de ce mec. Il n’était pas du genre à porter des jugements sur une situation dont il ne connaissait rien, et avait espéré que s’il avait détruit le bonheur de sa future femme, ce soit pour une bonne raison. Sinon, ce ne serait qu’un pauvre crétin de plus qui ne méritait pas le cœur de son amie, et il aurait su jouer de ses relations pour faire de sa vie un enfer, si jamais il serait réapparu. Et contre toute-attente, c’était ce qui s’était produit. « Et hier soir je suis rentrée tard du boulot, mais devant ma porte il y avait Isaak qui m'attendait comme une fleure après six ans sans nouvelle. J'étais en colère, je lui ai donné une gifle comme jamais je n'ai donnée à personne. Il a insisté pour m'expliquer le pourquoi du comment. Je ne voulais pas au début mais finalement, je l'ai quand même laissé m'expliquer. J'avais besoin de quelques verres donc j'ai un peu bu et finalement, j'ai couché avec... Je crois que c'était une erreur… » Ah oui quand même. C’était plutôt inattendu comme final. Ou peut-être pas tant que ça… Étant donné qu’ils avaient été sur le point de se marier, de se lier pour le pire et le meilleur, c’est que les sentiments qui les unissaient étaient extrêmement forts. Du coup, il comprenait ce qui avait pu les mener là, avec le tourbillon que ça avait dû provoquer dans leur tête et dans leur cœur. Devait-il en déduire qu’il avait une bonne excuse d’être parti puis d’être revenu ? Maxence la regardait avec empathie, conscient que c’était une situation des plus délicates. Et lui qui tenait plus du sauvage que du bourreau des cœurs, il ne savait franchement pas comment faire pour la rassurer et l’aider à y voir plus clair. « Ah oui, je comprends mieux pourquoi tu es bouleversée. Mais si tu l’as fait, je ne pense pas que ce soit par erreur. Tu en as peut-être eu besoin pour une raison qui t’échappe encore. » Il avait un leitmotiv simple dans la vie, c’était de ne pas regretter ce qu’on faisait. Que ce soit quelque chose qui fasse mal ou non, ça nous apportait forcément quelque chose. Si ce n’était pas le bonheur, c’était une expérience pour améliorer sa vie. Et parfois, le temps passant, on souriait de nos malheurs en constatant combien ils nous avaient rendu plus fort. « Tu veux bien me dire quelles excuses il t’a donné ? » Ça lui donnerait un ordre d'idée pour savoir quel genre d'homme était cet Isaak. Il attendit quelques secondes, puis se leva pour aller chercher un remontant. Elena en avait besoin, et ça le réveillerait peut-être. Quoique… avec ce qu’il avait déjà dans le sang, c’était peut-être une mauvaise. Il décida donc finalement de ne servir qu’un verre de cognac, qu’il lui tendit une fois revenue à ses côtés. Il posa ensuite une main rassurante sur la cuisse de la jeune femme, mais de manière totalement amicale. Un geste rare qui prouvait combien il était sensible à ce qu’elle traversait, alors qu’il n’était pas franchement quelqu’un de tactile.