D'habitude, je prenais la voiture pour me rendre à DC, mais j'avais entendu ce matin à la radio qu'une collision entre deux voitures avait provoqué des embouteillages monstres, ce qui ferait que j'arriverais en retard à mon rendez-vous. Rendez-vous plutôt important puisque cela était pour suivre l'état d'avancement de mon cancer. Je venais de finir il y a quelques semaines un énième round de chimiothérapie et mes médecins m'avaient autorisé à rentrer à Fairfax, mais il fallait que je sois ponctuel concernant mes rendez-vous médicaux. C'est pourquoi je m'étais rabattu sur cette dernière option: le train. Et après une journée à DC, je retournais à Fairfax, me demandant comment des gens pouvaient faire pour avoir une quotidien aussi routinier: métro boulot dodo. J'espérais vraiment que ça ne serait jamais moi. De toute façon, je savais que je ne tomberai jamais dans cette tourmente puisque mon temps sur cette Terre était limité, alors je ne m'autoriserai jamais à tomber dans cette routine, il en était hors de question. Assis contre la fenêtre, je regardais les alentours, reconnaissant cette ville dans laquelle j'avais grandi. Plus que quelques minutes avant d'arriver en ville, au terminus de cette ligne et de redevenir le mec au cancer que j'étais devenu il y a plus d'un an maintenant.

Si on me disait que si j’étais contente avec ma vie, la réponse serait oui. Bien sure que je l’étais. Ma mère n’avait plus à se faire de soucis, elle était heureuse, mon père pouvait continuer à ramener de l’argent et la boutique de fleurs de ma mère continuait de fonctionner comme la meilleure du quartier, et voilà, c’était une bonne vie. Mais si on me demandait, si c’était ce que je voulais faire de ma vie, la réponse serait non. Bien sure que je ne voulais pas être fleuriste, bien sure qu’être enfermé dans cette petite ville, j’étouffais. Mais pour moi, le bien être de ma mère était plus important que mon propre bonheur au bord de la mer ou sur un bateau. J’avais décidé de me rendre en ville surtout pour changer d’air un peu, malgré que je n’aimais pas cette ville. J’avais besoin de souffler et décidant comme à mon habitude de prendre le métro. Je conduisais, mais disons que ce n’était pas quelque chose que j’aimais spécialement. Le métro devrait arriver bientôt d’après les informations affichées sur le quai.

Mes résultats n'avaient rien d'alarmant, les médecins m'avaient renvoyé chez moi sans de mauvaises nouvelles mais sans bonnes nouvelles non plus. J'en étais au même stade, mais c'était mieux que rien, alors je rentrais chez moi, dans un assez bon état d'esprit. Rien ne viendrait gâcher ma journée, du moins, c'était ce que je pensais et c'était idiot. Alors que le train entrait en gare, je me levais de mon siège et m'avançais jusqu'aux portes qui attendraient que le train se soit immobilisé pour s'ouvrir automatiquement. En attendant, j'attrapais mon téléphone portable pour vérifier l'heure, comme si j'étais attendu quelque part, alors que ce n'était pas le cas. Je changeais de chanson alors qu'une voie à travers l'interphone du wagon nous annonçait qu'on était arrivé. Enfin les portes s'ouvraient et je levais mon regard. Ce fut un électrochoc qui me parcourut tout le corps et je fus incapable de bouger d'un centimètre. Mon regard s'était figé sur la personne qui me faisait face. Ailis, que j'avais réussi à ne pas croiser depuis que j'avais brusquement mis un terme à notre relation. Je finis ramené sur Terre par des bousculades qui étaient justifiées puisque j'étais en plein milieu de la sortie. Je lâchais un soupir et descendais enfin à quai, plongeant mes mains dans mes poches. J'savais pas vraiment quoi dire face à elle. « Ailis.. Tu as l'air d'aller bien.. Tant mieux. » J'savais pas quoi dire d'autre et de toute façon, je me doutais bien que j'étais la dernière personne qu'elle souhaitait voir.

Au fil des deux ans et demi où j’avais repris la boutique de ma mère, j’avais acquiers une certaine routine. La boutique serait fermée un jour la semaine en plus du dimanche, j’irais le matin ouvrir, ma mère viendrait un peu plus tard dans la journée, surtout pour voir les clients. Je refusais qu’elle touche à quoi que ce soit. Mon père m’avait expliqué qu’avant qu’on ne découvre sa maladie, elle avait fait tombé bon nombre de vases, d’outils, et autres ustensiles. Je ne comprenais pas pourquoi il n’avait rien fait, et ne m’avait rien dit. Enfin, de toute façon, maintenant, la boutique était mon terrain, et ma mère n’avait que le droit de venir pour parler avec les clients. Aujourd’hui était mon jour de repos, d’où je me rendais à DC. Je voyais enfin le train arriver, et j’étais déjà contente de monter dedans et de quitter la ville pour quelques heures. Les portes s’ouvrirent enfin pour laisser les passagers descendre, mais là. Si il y avait bien une personne que j’avais pas cru revoir, c’était bien lui. Milos. Il…Enfin j’étais complètement abasourdie. Il avait mis un fin à notre relation il y a environ un an. Ne plus le croiser avait été facile. Il ne venait plus à la boutique, et moi j’évitais les lieux où nous avions été ensemble. Je l’aimais encore, et le revoir faisait mon coeur battre à nouveau. Pourquoi aujourd’hui? Non, juste pourquoi est-ce que je devais le revoir et pourquoi est-ce qu’il dit quelque chose? Il aurait pu continuer son chemin, aussi froidement qu’il avait rompu avec moi. « Et toi, on dirait que l’armée te prive de sommeil. » Juste stupide comme remarque. Je sais pas pourquoi j’ai dis ça.

Je m'attendais vraiment à tout sauf à ça, tomber sur Ailis. Pendant un an je ne l'avais pas vu et ça m'avait arrangé, car j'avouais que je n'étais pas très fier de la manière dont j'avais fini les choses entre nous, mais je savais que cela avait été nécessaire. Et je préférais qu'elle me déteste plutôt que d'être un fardeau pour elle. Ma famille se faisait assez de souci comme ça, je ne voulais pas ajouter Ailis à cette longue liste, surtout qu'elle avait elle-même ses propres soucis. Alors j'avais fais le connard, n'espérant qu'une chose, qu'elle s'en remette. Après tout, elle méritait tout le bonheur du monde, mais je savais que ce n'était pas avec moi qu'elle l'aurait. Non, moi je lui aurais plutôt apporté des complications. J'avais hésité entre baisser le regard et faire comme si je ne l'avais pas vu, mais c'était se foutre de la gueule du monde, alors j'avais préféré la saluer, même si je savais qu'elle n'en ferait pas de même. « Ca devrait pas t'étonner, l'armée c'est quelque chose de dur... » Je lui mentais, encore une fois, mais ma santé n'était pas de son ressort et ne l'avait jamais été donc inutile de l'en informer. Puis, moins de personne savait et mieux je me portais. « C'est bon de te revoir... J'espère que tout va bien de ton côté. » Des manières, de la politesse, histoire de couvrir le mal-être qui s'était installé entre nous.

Je ne savais pas du tout quoi faire devant Milos. Mon coeur battait fortement dans ma poitrine, heurtant à chaque fois un peu plus fort la paroi de mes poumons. Je suffoquais. Ne plus le voir depuis un an m’avait permis de passer outre la peine de notre rupture. Mais a présent, il était là en cher et en os devant moi sur ce quai de station. Je ravalais ma salive, déstabilisée par la situation. Je n’avais vraiment pas cru que mes sentiments pour lui étaient encore si réels. Pourquoi était-il ici? Il devait être en repos ou quelque chose comme cela. J’essayais de le regarder en face, regardant derrière lui, l’horloge de la station indiquant quand le métro allait partir. C’était plus facile, sinon j’allais me remettre à pleurer. Il n’avait pas besoin de savoir que je ne m’en étais toujours pas remise, que j’étais toujours amoureuse de lui. Il avait été clair. Les relations à distance n’étaient pas son truc, et avec l’armée, il bougeait sans cesse. Un jour, peut-être que j’allais y arriver à l’oublier. « Ne te tue pas à la tache non plus. » Un peu stupide sachant le danger qu’il y avait. Je me mettais à regarder mes pieds. « Ouais, la routine quoi. » Je ne croyais à aucun de ses mots. Bon de me revoir? Je le doute vraiment, et qu’est-ce que cela pouvait lui faire si tout allait bien. Il m’avait froidement laissé tomber.

Elle ne me regardait pas, pas dans les yeux en tout cas. Je voyais qu'elle était quelque peu ailleurs, comme si se retrouver face à moi était un supplice pour elle. Ce que je pouvais comprendre, même si depuis le temps, elle aurait du s'en remettre. J'espérais vraiment qu'elle s'en était remise, car je ne valais pas la peine qu'elle se donne tant de mal, j'étais un gars comme les autres, un connard qui avait préféré la facilité. C'était plus simple qu'elle me déteste, plus simple que de la voir s'occuper de moi pendant ma maladie, plus simple seul que devenir son fardeau, tout ça pour qu'elle finisse par détester la personne que j'deviendrai une fois que le cancer m'aurait fait péter un câble. « On a plus vraiment de limites mais je fais du mieux que je peux. » Je la regardais, je jouais le jeu. Elle savait qu'il m'arrivait d'avoir des permissions donc ça expliquait ma présence aujourd'hui. Ce qui était le plus étonnant, c'est qu'elle n'ait pas entendu la moindre chose sur moi, alors que presque tout le monde savait. Ca ne pouvait signifier qu'une chose: qu'elle se fichait bien de moi. Et c'était tout ce que je lui souhaitais. Car encore une fois j'en valais pas la peine.  « La routine.. » Je me retenais de dire ce que je pensais un moment, mais ça ne durait pas très longtemps. « T'es pas faite pour ça... Vivre de routine. » 'Et c'est ce qui se serait passer si t'étais au courant pour mon cancer.' Pensais-je dans ma tête. C'est de ça dont j'avais le plus peur en fait, de gâcher sa vie. « Même si tu te persuades que ça te suffit, tu sais que c'est pas le cas. » J'savais qu'elle restait là pour sa mère, du moins à l'époque, et j'me doutais bien que maintenant, elle s'était laissé piégé par cette routine. « C'est pas notre genre. »

J’avais pas envie de regarder Milos dans les yeux, d’avoir a me rappeler son expression vide et froide quand il m’avait quitté. J’ai jamais spécialement cru au grand amour, jusqu’à ce que je tombe sur lui. Une simple rencontre qui avait changé ma vie, ma perception, juste pour être complètement rejeté quelques mois après. Et pourquoi? Parce qu’il n’arrivait pas les relations à distance? J’avais vraiment cru que c’était juste une stupide excuse pour quelque choses d’autres, mais j’avais pas cherché plus loin. Je ne voulais pas chercher plus loin. On dit que quand on aime quelqu’un, il faut savoir lâcher prise pour le bonheur de l’autre. Alors, je l’avais laissé partir, je l’avais laissé me briser le coeur en mille morceaux, espérant ne jamais le revoir. Mais j’imagine que j’avais peut-être trop espéré. Fairfax était une petite ville, et bien sure que Milos avait sa famille ici, qu’il y reviendrait quand il était en permission. J’avais été stupide. Je n’en revenais pas ce qu’il me dit par la suite. Que lui de toutes les personnes me rappellent que cette vie que je mène n’est pas celle que je veux. J’ai jamais été faite pour Fairfax, et mes trois ans en Nouvelle Zélande me l’avaient clairement montré. Cependant, avec ma mère, je ne pouvais pas l’abandonner. Elle était plus importante que ma carrière. « La bienêtre de ma mère me suffit très bien. Je ne vais pas vendre quelque chose qu’elle a chéri toute sa vie, et encore moins la mettre dans une maison de repos, pour aller vivre ma vie. » J’étais tout sauf ce genre de personne. J’étais là pour les gens qui me tenaient cher, et j’aurai continué à être là pour Milos si il avait voulu de moi.

Ca m'tuait de voir qu'elle était toujours au même point, un an après. Si je l'avais laissé, c'était pour profiter des opportunités qu'elle rencontrerait pour s'en aller de là, j'savais qu'elle aimait pas sa vie ici, qu'elle aurait voulu être ailleurs, qu'elle rêvait de grand. Et c'est bien ça qui m'avait plu chez elle. On avait les memes rêves, on ne voulait pas pourrir ici à Fairfax, et j'avais espérer qu'elle serait parti de là depuis le temps, mais ce n'était apparemment pas le cas, ce qui me mettait presque en colère, mais j'cachais ça, c'était pas à moi de l'être. « Je sais que c'est pas le cas... Mais si tu le dis. » J'arrêtais là, je disais plus rien, de toute façon, j'crois bien que j'en avais dis assez, et je ne savais même pas comment elle faisait pour ne pas m'inonder de paroles blessantes et autre de rancoeur après tout ce que je lui avais fais, sûrement parce qu'elle s'en était remise, ce qui dans l'fond, était un truc positif. « De toute façon, j'sais que j'ai plus rien à dire sur ta vie. J'trouve juste ça dommage, de te laisser pourrir ici, alors que c'est tout ce que t'as toujours détester. » J'hausse les épaules et fini par m'avancer, le train va pas tarder à partir et j'veux pas la mettre en retard. « Prend soin de toi et de ta mère. »

Je voulais plus parler à Milos, je voulais pas qu’il me rappelle à quel point, j’étais misérable dans ma vie ici. A quel point, je rêvais de demander a mon père qu’ils déménagent à DC, rien que pour la proximité. Il n’aurait plus a faire l’heure de trajet matin et soir pour aller a son travail, et moi, j’aurai pas besoin de rester a pourrir ici. Mais, je savais que c’était impossible, que je ne pourrais pas demander cela a mon père. Il avait une très bonne carrière, il gagnait très bien sa vie, et c’était grâce a lui que j’ai eu une vie plus que parfaite, que j’ai pu partir en Floride pour mes études. Il y avait plein de raisons que je ne pouvais pas demander de faire ce sacrifice à mon père, et que moi je devais prendre la responsabilité de ma mère. Je ne pouvais tout simplement pas partir comme cela alors que je la savais entrain de souffrir. Et il continuait. Je le regardais plus. Le sol était bien plus intéressant. Mensonge. Je ne voulais pas qu’il voit les larmes qui se formaient lentement au coin de mes yeux. Le train allait partir, alors je m’avançais vers la porte. C’est mieux comme cela. On aurait jamais dû se revoir. Je savais que j’allais avoir trop mal. « Pourquoi ? » Finis-je par lui balancer dans ma voix semi-craqué.

Je soupirais légèrement, ça me plaisait pas de recroiser Ailis ainsi, après tout ce temps, et j'avais fais de mon mieux pour que cet échange ne soit pas désastreux, pénible, mais bon, c'était impossible, pas quand on connaissait la manière dont on s'était quitté, dont je l'avais quitté. Et j'avais espéré, jusqu'à la dernière minute, qu'elle ne parle pas de ça, et j'y avais cru, jusqu'à ce qu'elle me demande pourquoi. Je pourrais jouer à l'idiot et lui demander de quoi elle parlait, mais je savais exactement de quoi elle parlait. J'étais dos à elle, car j'étais prêt à partir lorsqu'elle m'avait posé la question. Ce qui me faisait le plus de mal, c'était le son de sa voix, qui laisser entendre qu'elle n'allait pas bien. « Ailis... » Je lâchais un soupir, lui faisant à nouveau face. « Tu sais pourquoi... » Enfin pas vraiment, mais jamais je ne lui dirai la vérité sur ce qui m'avait motivé à rompre avec elle, elle ne devait jamais savoir. « Je pensais pouvoir gérer la distance, mais c'était trop pour moi. Tu me manquais trop et c'était néfaste pour mon travail. »

C’était sorti tout seul. Pourquoi? Oui, j’aimerai tellement le savoir pourquoi est-ce qu’il m’avait abandonné comme cela? Est-ce qu’il ne souffrait pas de cette rupture? Clairement pas, vu comment il avait si facilement pu y mettre un terme. Et moi je souffrais toujours, un an après la plaie ne s’était toujours pas refermée. Elle n’allait jamais le faire. La cicatrice ne se refermait pas, et maintenant qu’il était la devant moi, tout me revenait dans la figure, comme un vent glacial. Ca faisait mal de le revoir, tellement mal. Je voulais pleurer. J’allais le faire, j’étais déjà sur le point de craquer. Entendre Milos me le redire ne faisait que déclencher la descente aux enfers. J’arrivais pas à lui parler, à lui répondre. Alors je décidais de fuir, de fuir la douleur, la souffrance, et de monter dans ce stupide train le plus vite que je pouvais. Et je m’effondrais une fois assise dedans, laissant toutes les larmes couler à flot. Foutu Milos à continuer de me faire souffrir autant.

Y'avait toujours eu une part de vérité dans ce que je disais, la distance avait joué un rôle dans ma décision, je supportais mal la distance, j'aimais pas l'idée d'elle restée à Fairfax à m'attendre, j'aimais pas non plus le fait de savoir que je ne la verrais pas avant des mois, de savoir que je détruisais son petit coeur à chaque fois que je repartais. J'aimais pas non plus l'idée de devoir faire ma vie, mon métier autour d'une personne aussi. Il y avait plus d'inconvénients que d'avantages dans notre relation, mais pour elle, j'avais voulu essayer, parce qu'elle en valait la peine, parce que son simple sourire suffisait à réchauffer mon coeur. Mais j'tenais tellement à elle qu'il était hors de question que je l'entraîne dans cet enfer qu'était le cancer. J'utilisais pas le cancer comme excuse, parce que la dernière chose que je voulais, c'était arrêter, mais y'avait pas d'autre solution. Je ne voulais juste pas devenir un fardeau, son fardeau. J'voyais bien que la situation dégénérée petit à petit, et sa question était le point de non retour. Il me semble que j'avais tort, elle m'avait peut être pas oublié au final, ce qui m'faisait chier, car elle méritait mieux. Pas de réponse, pas même en regard de sa part. Je lâchais un soupir lorsqu'elle se dirigea vers le train. « Ailis, s'il te plait... » Je m'avançais pour la rejoindre mais les portes se fermèrent sous mes yeux, annonçant le départ imminent du train. J'essayais d'ouvrir les portes, appuyant sur le bouton, mais rien à faire. Ce qui m'énervait un peu plus. Je fis quelques pas, tapant sur la vitre pour capter son attention. Mais tout ce que je voyais c'était une Ailis effondrée, et moi j'étais impuissant, j'pouvais rien faire. « Ailis ! » J'sortais rapidement mon portable de ma poche, espérant qu'elle n'ait pas changé de numéro. Ca sonnait, une, deux, trois tonalités... Tandis que le train partait sous mes yeux, emportant mon ex petite amie au passage.

Pourquoi est-ce que cela faisait si mal de revoir Milos? Cela avait fait un an que je ne l’avais plus vu, pas depuis qu’il m’avait brisé en milles morceaux. Cela avait été facile d’oublier mes sentiments, de les ranger dans un coin perdu de mon esprit. Cependant, une fois qu’il était là, tout était revenu comme une tempête sans fin à laquelle je n’arrivais pas à résister, et au final, je l’avais me laissé emporter avec elle dans un gouffre que j’avais oublié. Je ne voulais pas redevenir cette jeune fille perdue qui passait son temps enfermée dans le noir à se laisser mourir pour un homme qui ne voulait pas même d’elle. Je l’avais été après la rupture, fermant la boutique pendant quelques semaines, et refusant de sortir de chez moi. Si cela n’avait pas été pour ma mère, je crois que j’aurai pu continuer ainsi pendant très longtemps. Elle a su me montrer que la vie ne s’arrêtait pas, elle m’avait rappelé aussi pourquoi j’étais là, ou plutôt le bruit des assiettes qui tombaient sans cesse l’avait fait. Au final, j’avais pris sur moi, et j’avais continué ma vie, me disant que Milos devait être heureux maintenant, et c’était la seule chose qui m’importait. Qu’il soit heureux, que cela soit avec moi ou pas. Et pourtant, je savais très bien que je ne l’avais pas oublié, que mes sentiments n’étaient que rester longuement endormie, attendant le bon moment pour venir exploser et me détruire a nouveau. J’arrivais pas a lui faire face, j’avais pas envie qu’il me voit dans cet état, alors j’étais dans le train, secondes avant qu’il ne démarre, et je pleurais toute la douleur que j’avais en moi, ignorant les coups sur la fenêtre. Mon téléphone se mettait à sonner, tremblante, je le sortis de mon sac à main, répondant sachant que trop bien qui cela pouvait être. « Qu’est-ce que tu veux? » M’exclamais-je, lui criant presque dessus.

C'était pas plaisant de voir ça, je détestais savoir que j'étais responsable de son état. Pourquoi se faisait-elle du mal ainsi ? Pourquoi elle avait voulu ressasser le passé alors qu'elle savait très bien ce que j'allais lui répondre. Rien de bien nouveau. Si elle espérait en apprendre plus sur mes motivations, elle se trompait. J'avais été clair, elle ne devait pas savoir pour mon état de santé, pour mon cancer. Ce n'était pas ses affaires. C'était les affaires de ma famille, ma petite amie, mais j'étais célibataire, elle n'était plus mienne alors elle pouvait pleurer, me supplier, je ne changerai pas d'avis. Pourtant j'aimais pas la savoir comme ça, savoir qu'elle souffrait encore à cause de notre rupture. Si elle pouvait continuer pendant des années durant, moi pas, alors j'avais rompu, au bon moment. Je soupirais légèrement alors que je regardais le train s'éloigner, partir; puis j'espérais qu'elle décroche. Et j'perdais espoir jusqu'à ce que sa voix se fasse entendre à l'autre bout du fil. J'savais pas trop quoi lui dire, j'voulais juste m'assurer qu'elle allait bien, mais la blague, je savais bien que c'était pas le cas, sinon, pourquoi se serait-elle mise à éclater en sanglots ? « Je veux... Arrêtes de pleurer pour moi. Tu sais que j'en vaux pas la peine. » Je regardais autour de moi, j'aurai aimé lui dire tout ça de vive voix et pas par téléphone interposé. En attendant, j'prenais la direction de la sortie. « J'suis un connard. Alors arrêtes de pleurer pour un gars comme moi bon sang. Je vais te dire ce que je dirai à mes soeurs. T'es ... pathétique. Ca fait un an, tout ce que tu devrais faire c'est plutôt m'insulter, t'en foutre, pas pleurer. J'ai été lâche, j'ai pas tenu mes promesses. Alors ne verses plus une larme pour un mec comme moi. » J'avais plus rien à lui dire, alors je raccrochais, sans lui laisser le temps de répondre à ma tirade. Si elle me détestait c'était tant mieux, c'était l'effet désiré.