Plongé dans mes pensées, je ne remarquais pas la silhouette qui se dirigeait anormalement vite vers moi. Je n’avais pas le temps d’éviter la collision et prenais ce que je devinais être une tête dans le nez.
« Put… AÏE ! » Je menais mes mains automatiques sur mon nez, m’assurant aussitôt qu’il n’était pas cassé ou qu’aucun sang n’en sortait. Une vérification rapide me rassurait. Ce qui m’inquiétait le plus, c’était l’absence soudaine de mon téléphone dans ma main. Il n’était pas là quand elle s’était propulsée sur mon nez. Ce qui voulait dire…
« Quel abruti ! » Une voix féminine attira mon attention. Surement celle qui appartenait à la tête qui avait voulu faire plus ample connaissance avec mon nez.
« Hey ! » râlais-je en prenant l’insulte pour moi. Ce n’était pas moi qui lui avais foncé dessus ! J’étais à l’arrêt. En plus milieu du chemin, certes, mais à l’arrêt.
« MA TABLETTE ! » finies les insultes, place aux cris inhumains. Est-ce que je criais moi parce que j’avais égaré…
« Mon portable ! ». C’est en suivant le regard de la jeune femme devant moi que j’avais vu mon téléphone prendre un bain dans son café.
« Oh merde. » réagit-elle, faisant écho à une pensée que je hurlais à travers toute ma boîte crânienne.
La jolie rousse leva les yeux pour croiser les miens. Maladroite oui, mais il fallait bien l’avouer, jolie. Très jolie. Mais très maladroite.
« Je crois que mon téléphone est dans votre café. » relevais-je, comme si c’était
vraiment nécessaire. Sur ces mots, j’enlevais ma capuche et passais une main dans mes cheveux.
Réfléchis Jameson, réfléchis. C’était mon outil de travail qui gisait, là, dans ce bain de caféine par terre. Mon patron allait me tuer.
Merde mon patron était le Président des Etats-Unis. J’étais mort. J’allais finir comme ce mec qui… Non. Il ne fallait pas que je pense à cet homme dont l’Amérique ne devrait jamais apprendre la fin funeste et horrible.
« Ok. Peut-être qu’il va bien. » essayais-je de me convaincre en m’accroupissant près de la scène de crime. De mes deux doigts, j’attrapais l’appareil dans le gobelet de carton, l’agitant en le sortant de la boisson encore chaude. Je l’essuyais avec ma manche et priais.
« Fonctionne. Fonctionne… » murmurais-je, faisant appel au Dieu en qui je faisais semblant de croire. Pour une fois, j’aimerais croire en toi big guy. Fais ta magie et j’écouterai réellement le prochain sermon à l’église. J’allais pour déverrouiller l’appareil lorsque je vis l’écran s’allumer. Un appel.
« Han ! » Merde, j’allais devoir écouter dimanche prochain.
« Il fonctionne ! » Oubliant la jeune femme qui m’observait, je répondais à l’appel. Ou… au semi-appel que j’arrivais à capter. J’entendais un mot sur deux, reconnaissais à peine la voix du chief of staff, et raccrochais simplement en promettant d’arriver en milieu de matinée. Peut-être m’avait-il dit de rappliquer immédiatement. Je ne le saurais pas avant de mettre le pied à la maison blanche un peu plus tard. En attendant…
« En fait il fonctionne plus. » me sentais-je obligé de rectifier, parce que la vie de mon téléphone intéressait très certainement la jolie rousse.
« Auprès de qui dois-je râler ? Vous ? Starbucks Coffee ? Le fabriquant de couverte qui saute lorsque le gobelet tombe ? » Je marquais une pause et levais un regard accusateur au ciel.
« Dieu ? » finissais-je de demander en reportant toute mon attention sur la jeune femme. Ce n’est qu’à ce moment-là que je remarquais l’ours à ses côtés.
« Ou c’est peut-être toi l’auteur de ce crime infâme ? » demandais-je d’une voix mielleuse en m’abaissant pour venir caresser la tête du chow-chow.